Fast fashion ou comment la mode est devenue une des industries les plus polluante au monde

La fast fashion (« mode rapide » en français) est un segment de l’industrie de la mode qui produit des vêtements très vite et très souvent (jusqu’à 36 collections par an ! 1) ce qui entraine une consommation frénétique en déconnexion totale avec nos besoins réels.

Résultat : on produit, on consomme, on jette toujours plus (100 milliards de vêtements sont vendus chaque année dans le monde)2. En 20 ans, on a doublé notre consommation de vêtements et les prévisions ne sont pas optimistes puisqu’elles montent à 65 % de plus pour 2030.

C’est un pan de l’économie mondiale très important : selon les estimations de l’UNECE (Commission économique pour l’Europe des Nations Unies), 75 millions de personnes y travaillent dans le monde3 . Son mode de fonctionnement est néanmoins source d’emplois précaires et est la seconde cause de pollution de notre planète, juste après l’industrie pétrochimique (chimie des dérivés du pétrole).

Un fonctionnement peu glorieux !

Derrière nos vêtements donc, une industrie très polluante avec une système économique qui repose sur deux piliers :

  • La pratique de prix très bas obtenus en délocalisant la fabrication de vêtements dans des pays où la main d’œuvre est exploitée à moindres coûts et en réduisant leur qualité (l’objectif ici n’est pas de vous permettre de les porter longtemps) ;
  • Les incitations à la consommation par un matraquage publicitaire constant, des soldes permanentes (on fabrique même pour permettre plus de décotes !), toujours plus de nouveautés avec des nouvelles collections proposées chaque semaine (40 000 nouveaux modèles par an chez Zara, par exemple).

Bref, tout est fait pour produire plus et nous faire consommer davantage. Or, on sait que cette production frénétique provoque de très nombreux problèmes environnementaux pendant tout le cycle de fabrication et de vie d’un vêtement.

Regardons d’un peu plus près quelques étapes de ce cycle :

  • Les matières premières, les plus utilisées sont le coton (24,7 millions de tonnes en 2021 2) et le polyester (60,5 millions de tonnes en 2021 2). Ils présentent, aussi bien l’un que l’autre, un impact environnemental problématique.

On pense souvent que le coton est meilleur pour la planète que le polyester. Or, il n’en n’est rien. La nocivité du polyester est généralement connue : c’est une matière dérivée du pétrole (ressource limitée), produisant des gaz à effet de serre et relâchant des microfibres plastiques à chaque lavage. L’impact environnemental du coton est beaucoup moins notoire. Comme c’est une plante, on imagine, à tort, que son usage est moins problématique. Il n’en est rien, car sa production demande beaucoup de pesticides, d’engrais (fertilisants à l’azote et au phosphore, très polluants à produire et nocifs pour l’environnement) et une grande quantité d’eau. De plus, sa culture intensive présente une menace pour la biodiversité, car les pesticides sont responsables de la disparition de la moitié des variétés d’insectes depuis 30 ans.

Conscients du problème, les industriels tentent de nous rassurer en nous vantant les mérites de leur coton recyclé, durable ou éco-responsable. Ils réussissent ainsi à nous séduire, alors que ces dénominations ne correspondent à aucun label et ne sont donc pas contrôlées. En réalité, ces cotons consomment quand même des pesticides. C’est ce qu’on appelle le greenwashing, une technique de marketing trompeuse qui donne une image éco-responsable à l’entreprise alors qu’il n’en est rien. En réalité, seul 1% du coton serait bio et sans pesticide. Alors, peu de chance que notre tee-shirt acheté 20 euros le soit !

  • La production du textile et la fabrication des vêtements dans des pays qui permettent de les produire à moindres coûts … Pour nous et les industriels. Celles et ceux qui paient l’addition de cette surproduction, ce sont les ouvrier·ière·s du textile du continent asiatique (principalement du Pakistan, du Bengladesh, de l’Inde et de la Chine). Elles·ils produisent à une cadence effrénée nos vêtements pour un salaire de misère (0.32 cents US$/heure au Bangladesh 2), en manipulant des matières toxiques qui les rendent malades. Sans compter l’impact environnemental que cela engendre puisque les teintures polluent les rivières. Ainsi, en Chine, on dit qu’on peut connaitre la nouvelle couleur à la mode en voyant la teinte que prend l’eau des rivières à chaque nouvelle collection.

 

  • Le transport de nos vêtements jusqu’aux boutiques pèse également son poids dans la balance énergétique. Cela coute moins cher aux industriels de transporter une marchandise venant de l’autre bout de la planète que de la fabriquer chez nous ! Et comme, en plus d’être moins cher, tout doit être rapide, ce transport se fait principalement en avion (grand émetteur de gaz à effet de serre, faut-il le rappeler…).
  • La vie d’un vêtement, une fois acheté, continue à être polluante. Son entretien va nécessiter de nombreuses lessives. Elles vont rejeter des microfibres de nylon, de polyester, d’élasthanne, etc… et des produits toxiques contenus dans les produits nettoyants et adoucissants. À ce bilan déjà lourd, il faut aussi ajouter, parfois, les nombreux séchages en machine.

Viennent ensuite leur fin de vie et le cout énergétique que leurs déchets produisent. Sans compter que certains vêtements ne seront jamais ou peu portés. Toute l’énergie utilisée pour les produire, puis pour les détruire, n’aura donc servi à rien.

Au final, chaque année, c’est 4 millions de tonnes de déchets vestimentaires 2 jetés par les consommateurs·trices mais aussi par les entreprises elles-mêmes qui se débarrassent de leurs invendus (parfois en les incinérant).

Que faire ? 

  • En tant que consommateurs·trices, notre pouvoir est avant tout dans la quantité et la qualité de ce que l’on achète. En un mot : acheter moins et moins souvent, pour acheter mieux ! Comment ? En privilégiant les matières comme le lin, le chanvre, le coton bio ; en se fiant aux labels (voir liste ci-dessous) ; en optant pour des modèles intemporels, des couleurs qui resteront tendance…
  • Il faut réclamer un cadre légal pour l’appellation « mode éthique ». Aujourd’hui, la loi est trop floue et les marques peuvent se revendiquer éco-friendly selon les critères qui leur conviennent… Il est important de demander aux états de fixer des éco-taxes pour les marques pollueuses et des lois contraignantes pour encadrer leurs pratiques.
  • Se renseigner sur les labels. 4 labels parmi les plus solides et fiables 4.

Attention aux labels créés par les enseignes de fast fashion et qui ne sont rien d’autre que du greenwashing. Ils sont définis avec des critères qui arrangent leur industrie, ne sont soumis à aucun contrôle extérieur et deviennent un argument marketing parmi d’autres. À 9€ le t-shirt, transporté depuis l’autre bout du monde, vous imaginez bien que le bien-être au travail et le respect de l’environnement ne sont pas des priorités. En cas de doute, sortez votre smartphone et effectuez une recherche rapide.

  • Acheter en seconde main, donner une seconde vie à nos vêtements en les offrant plutôt qu’en les jetant ou favoriser le troc (mais pour cela, encore faut-il avoir évité les produits issus de la fast-fashion dont la durée de vie est très limitée en raison de leur piètre qualité). 
  • Prendre soin de nos vêtements en évitant le séchoir et des lessives trop fréquentes, les réparer plutôt que de les jeter… Et ainsi, pourquoi pas, se découvrir une passion et avoir envie de créer ses propres vêtements.

 

Pour finir, la solution ne serait-elle pas de changer notre rapport au bonheur en résistant aux sirènes de la surconsommation et en revenant à une consommation plus raisonnable ? Acheter dix nouvelles pièces de vêtements à chaque saison n’a jamais rendu personne plus heureux·euse. Même si tout (et surtout le marketing mis en place par les industries) nous pousse à croire le contraire !

Ressources utiles